De Saqqaq à Pond Inlet
De Saqqaq à Pond Inlet,
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Mardi, 31 juillet (suite)
Nous profitons d’une dernière journée à Saqqaq au Groenland pour nous reposer et partir en direction de Pond Inlet frais et dispos. Nous sommes tous un peu fatigués et avons besoin d’une journée de repos. La météo nous indique du vent de nord tournant à l’est et au sud. Nous ferons donc un peu de près (remonter le vent) avant d’apprécier les allures portantes sans oublier les quelques heures de moteur lors des périodes de calme.
Ce matin nous avons pu envoyer et recevoir nos messages via la connexion internet du bureau de la mairie. La mairie est la maison communautaire qui gère aussi une laverie et un service de douche. Il y a une liste d’attente impressionnante pour utiliser les machines à laver, alors on oublie ça. Nous avons demandé pour prendre une douche (un peu moins de 3$ par personne), mais on nous a répondu que ce n’était pas possible, car le système d’eau chaude ne fonctionnait pas. Dommage!
En après-midi nous demandons de nouveau pour la douche et on nous répond que l’eau chaude ne fonctionne pas encore. Guy teste l’eau du lavabo à la laverie, elle est tiède. Il décide de se laver les cheveux là. Yann va demander du nouveau pour prendre une douche à l’eau tiède. Ce n’était pas si froid et nous avons tous apprécié.
Nous allons faire une petite épicerie, côtelettes, patates, crème UHT, riz, et du vin que nous ne trouverons plus dans le nord du Canada. En sortant de l’épicerie, nous croisons un pêcheur de baleine qui vendait le fruit de sa pêche. C’est l’occasion pour nous d’y gouter! Nous achetons un bon morceau, environ 2 kg (17$) et le pêcheur nous offre un gros morceau de gras de baleine et nous dit qu’on peut le manger cru.
Nicole prépare les steaks de baleine
En arrivant au bateau nous goûtons au gras de baleine… pas extra et recrachons le morceau! Quant à Yann, il y goûte et trouve ça bon! Il aime vraiment tout celui-là!
Nicole prépare quelques steaks de baleine pour le souper et l’apprête avec de la crème et de la moutarde de Dijon. Très bon! La baleine est une viande très riche et nous avons eu besoin d’une bonne marche à terre pour digérer le tout.
Je prépare un bourguignon avec ce qui reste de viande, environ 1.5 kilo, pour la traversée. Le plat restera dans l’autocuiseur et nous n’aurons qu’à le faire réchauffer en navigation, un peu riche mais toujours aussi bon.
À terre, nous avons croisé une famille dont les deux enfants (3 et 4 ans) s’amusaient à jouer au soccer. Ils étaient très bons et vraiment impressionnant à voir jouer, en particulier la petite fille de trois ans! Et elle riait tout le temps, surtout lorsque Guy, en jouant avec elle, faisait semblant de rater le ballon.
Mercredi 1 er août
Je prends mon quart à 17h30. Je m’installe à la barre et m’assois sur le banc arrière qui me donne une bonne visibilité sur l’avant du bateau. Un vent léger et frisquet arrive de face. Je prends quelques minutes pour trouver la position idéale pour barrer pendant mon heure et demie de veille. Nous devons nous relayer à la barre car, le pilote automatique que nous utilisons habituellement lorsque nous naviguons à moteur ne fonctionne pas sous ces latitudes. Histoire de compas à l’intérieur qui se dérègle quand on se rapproche du pôle Nord.
Cette heure et demie, seule sur le pont, me permet de prendre la pleine mesure de nos dernières semaines de voyage, au Groenland. Les Groenlandais sont des gens très calmes et joyeux. Ils aiment s’amuser, rire et offrir leur aide. Nous avons fait de belles rencontres : Marie à Nuuk qui nous a offert un goûter et la possibilité de faire notre lavage chez elle; Édouard et Joël qui nous ont emmenés pêcher le flétan; Neils qui nous a offert de la truite quand il a vu qu’on n’était pas parvenu à en pêcher nous-même dans la rivière; Michey qui nous a offert son aide à Saqqaq… Merci à vous, vous nous laissez de beaux souvenirs.
Au Groenland, deux cultures se côtoient, celle des Groenlandais (Inuits) et celle des Danois. Cette cohabitation semble réussie, car chacun respecte la culture et les origines de l’autre.
Il est 19h, c’est le temps pour moi d’aller dormir un peu, car je reprends la barre à 23h30.
Jeudi 2 août
Quart de 23h30 à 1h00 du matin : réveil difficile, mais conditions agréables. Bonne visibilité et mer calme, lever de soleil (même s’il ne se couche pas vraiment) et de lune magnifiques!
Quart de 5h30 : je n’ai pas réussi à dormir, mais nous sommes à voile donc nous pouvons naviguer sous régulateur d’allure (pilote automatique qui fonctionne sous voile) et nous n’avons pas à barrer pour l’instant. Une brume opaque rend la visibilité nulle. Nous pouvons heureusement éviter les Icebergs qui se dévoilent sur l’écran du radar.
À 6h30, je demande à Guy de m’aider à réduire la voilure. Le vent forcit.
Réveil à 9h00 un peu barbouillée. J’ai réussi à dormir une petite heure.
Vendredi 3 août
Cette navigation est éprouvante pour moi. Le manque de sommeil, la promiscuité, le froid sont des éléments qui s’accumulent et entraînent de nouvelles émotions qui sont difficiles â gérer. Je fais des découvertes sur ma façon de réagir face aux autres et face à moi-même. Je deviens irascible, émotive, suspicieuse, etc. J’imagine aussi que l’approche de la ménopause n’aide en rien… Vous imaginez le tableau? Bref, j’apprends. Et je me dois d’apprendre vite, l’atmosphère à bord en dépend!
«Nous avons tous nos passages à traverser»
Je me trouve devant une décision à prendre face à la suite du voyage. Je sais que le passage du Nord-Ouest me demandera beaucoup d’énergie et de courage. Si je continue, c’est d’abord pour aider Guy, pour l’épauler. Mais je ne peux pas demander aux autres de subir mes sautes d’humeur. Je sais, par ailleurs, qu’après une bonne nuit de sommeil, tout se replace. Pourquoi arrêter?
Enfin reposée, je pense à tous ceux qui me donnent un exemple de courage. Je pense à ma tante Simone qui a accompagné son conjoint dans sa maladie, jusqu’à la fin; je pense à mes parents qui s’épaulent encore après 61 ans de mariage, dans les bons et les moments les plus durs; je pense à mes amis qui traversent une séparation, la maladie, le deuil…; je pense à tous ceux qui traversent leur vie avec courage. Nous avons tous nos passages du Nord-Ouest.
Et puis, qu’est-ce que je veux transmettre à mes filles? La réponse est là. Je dois continuer, pour l’amour, pour le courage, pour la vie. Je dois surtout apprendre à apprécier les belles choses de la vie. Derrière la fatigue, il y a ce beau lever de soleil, derrière l’incompréhension, il y a toute cette énergie issue d’un groupe, derrière la peine il y a la joie que procure un saut de baleine…
Cette nuit, j’ai dormi. Guy ne m’a pas réveillé pour mon quart de 5h30 du matin. J’ai dormi 6 heures en ligne! Je me lève encore émotive, mais j’arrive à voir clair dans mes émotions.
Il est 11h00, je reprends mon quart à 11h30.
Je vais d’abord préparer une omelette au jambon pour l’équipage. Le quotidien me rattrape!
Dimanche 5 août
Nous arrivons à Pond Inlet. La traversée s’est bien passée même si je suis passée à travers une foule d’états d’âme.
Aujourd’hui, avant d’arriver, j’ai fait un grand ménage du bateau, pendant que tout le monde se trouvait dehors. Ça fait du bien.
Nous sommes entourés de montagnes avec des pics enneigés en plein mois d’août!
Mon frère François sera là dans quelques jours, j’ai bien hâte de le revoir.
Claire
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